Philosophie au présent # 02 juillet 2022 - L'être et la vibration spirituelle chez Mark Rothko

Dans ses tableaux, et en particulier dans ceux de la dernière période, Rothko invite notre regard à extraire de lui-même « la part infinie d’humanité qu’il porte en lui ». Que veut-il nous dire par cette phrase ? Comment entendre cette « part infinie d’humanité » ? Que représente-t-elle ?
Quand Rothko parle de sa peinture, il la relie à une « expérience religieuse ». « Les personnes qui pleurent devant mes tableaux font la même expérience religieuse que celle que j’ai eue lorsque je les ai peints. » La profondeur spatiale et la puissance méditative de ses Untitled (« Sans titre ») des années 1950 sont uniques : elles nous plongent le spectateur dans un dialogue intérieur où nous retrouvons cette « part infinie d’humanité » entendue comme un immémorial en nous, un « quelque chose d’incréé ».
Or jusqu’où ce dialogue ne nous conduit-il pas à l’aporie en nous heurtant à l’image qui déborde nos représentations et nous déporte vers les confins d’une réalité que nous ignorons ?
Cette image zéro et infinie à la fois est déroutante : elle nous fait perdre les repères connus, nous déloge de nos quant-à-soi de pensée et de vision pour nous faire entrer dans le mystère même dont elle nait : celui de l’Un, de l’Abîme, du Fond sans fond (Abgrund).
Dans ce lien à l’abîme, au « hors phénomène », Mark Rothko nous semble rejoindre Maître Eckhart, et la mystique rhénane. C’est ce que nous voudrions ici montrer. Toutefois, en faire l’expérience dans notre finitude incarnée n’est-ce pas faire l’épreuve d’un manque, d’un creux, d’un désir ? Toute la question sera alors de savoir quel est l’obscur objet de ce désir.
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